25 Oct 2016

Lady Gaga en couverture de NME

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Après T magazine, Lady Gaga était de nouveau en couverture, la semaine dernière, d’un hebdomadaire musical anglais gratuit baptisé NME. Vous pouvez à présent visionner la couverture dans notre galerie, et découvrir son interview traduite par nos soins : elle y parle entre autres de l’échec (relatif) d’ARTPOP, de la réaction du fils de Bowie après sa performance-hommage, ou encore (bien sûr) de Joanne.

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Lire l'interview de NME (FR)
La méga star de la pop Lady Gaga est de retour avec un album sautillant pour surprendre même les fans les plus fervents – et ceci grâce à l’aide spirituelle de sa tante décédée. Dan Stubbs écoute comment ‘Joanne’ a aidé à guérir une blessure familiale de longue date et a aidé Gaga à remonter la pente.
 
Le 9 septembre, Lady Gaga a sauté sur la scène du Moth Club de Londres, une salle moite de Hackney avec des murs peints en doré et un rideau comparable à un emballage de Quality Street chatoyant. Vêtue d’un crop top gris et d’un short argenté, elle a chanté ‘Perfect Illusion’, le nouveau single rocailleux de son nouvel album ‘Joanne’, qui sort aujourd’hui. Gaga y joue de la country, du rock, du disco, de la pop et tout ce qu’il y a au milieu de tout ça. Il y a un duo avec Florence Welch qui ressemble à ‘Bennie And The Jets’ d’Elton John, une chanson d’amour dédiée à John Wayne et un morceau tordu avec Beck dans lequel les paroles semblent de minces euphémismes à la masturbation. Sur la couverture : Lady Gaga de profil, à peine maquillée. C’est un visage qui devrait être reconnaissable mais ne l’est pas d’une certaine manière.
 
Pour les gens empaquetés au Moth Club, cela a dû ressembler à une rencontre du troisième type – voir en chair et en os une véritable superstar intouchable dans un club qui ressemble à boudoir de Del Boy Trotter (NdT : personnage de la série britannique Only Fools and Horses). Mais c’est la clef de l’expérience ‘Joanne’. Alors que c’est un album qui pointe dans différentes directions, toutes sont populistes et accessibles – et matières à être dans le jukebox de votre boui-boui local, ou à être la bande-son de vos hot dogs durant la prochaine mi-temps du Super Bowl. Gaga est de retour et elle veut aller boire une bière avec vous. Excepté, insiste-t-elle, que ce n’est pas aussi cynique.
 
« Aucun des albums que j’ai faits n’a une construction délibérée – ils sont toujours une expression de qui je suis à ce moment-là et où j’en suis dans ma vie, » dit-elle, au téléphone depuis un « endroit confidentiel » dans le désert. « Mon intention était de me connecter avec les gens qui ne se connecteraient pas avec quelqu’un comme moi en temps normal. »
 
Phrase intéressante, car qui est en fait Lady Gaga ? A ses débuts en 2008, les choses étaient simples : elle chantait au sujet de ‘La Célébrité’ et est devenue célèbre – monstrueusement, massivement célèbre, avec 15 millions d’albums vendus et une tournée spectaculaire de 203 dates qui ont engrangées 200 millions de dollars. A la suite de ça, son second album ‘Born This Way’ célébrait l’individualité et a accrue la Gaga-titude au point que sur l’une des éditions elle était représentée en hybride mi-humain, mi-moto. Puis est venu en 2013 le troisième album conceptuel ‘ArtPop’, où l’artiste est un objet artistique. Ses singles ont échoué et son concept a mis à rude épreuve ceux qui l’ont écouté, prêchant plus en faveur de ses inconditionnels Little Monsters – le groupe de fans fidèles qui l’appellent ‘Maman Monstre’, et la vénèrent comme un gourou.
 
Gaga contourne la notion que l’album a eu des ratés (« Pour être honnête, je me suis sentie plus connectée que jamais à mes fans en faisant ‘ArtPop’ – spécialement durant l’ArtRave, » insiste-t-elle) mais elle admet que tout n’a pas été rose. Peu de temps après sa sortie, elle a envisagé de quitter la musique pour de bon. Ou, plutôt, de quitter le jeu de la célébrité.
 
« C’était un moment de grande dépression dans ma vie et j’étais incapable de voir mes propres capacités ou mon talent, » dit-elle. « Et lorsque vous perdez prise de ce genre de choses, vous pouvez tomber en flèche. Mais vous savez, la phrase ‘quitter la musique’ signifie une chose et pour moi il en signifie une autre. Je voulais dire ‘arrêter de sortir de la musique’, par opposition à le faire juste pour moi-même, ce qui me rend véritablement heureuse. »
 
« Lorsque vous devenez célèbre ou que vous devenez une star, il y a toutes ces choses qui commencent à arriver et vous devez travailler avec le système – spécialement dans l’industrie de la musique actuelle, qui est tellement différente. Vous avez affaire à la guerre du streaming qui est un cauchemar absolu en tant qu’artiste car cela ne concerne pas la musique mais uniquement le business – et ce n’est pas du tout qui je suis. Au final, celle que je suis vraiment est une petite fille qui adorait jouer du piano. »
 
« Une fois que vous commencez à mettre cette petite fille dans le système, elle commence à… se demander pourquoi elle fait ça. Ce que je veux pour mes fans et pour le monde, pour tous ceux qui ressentent de la souffrance, c’est qu’ils se penchent sur cette peine, qu’ils l’étreignent aussi fort que possible et commencent leur processus de guérison. » Et c’est ce qu’elle a fait.
 
Pour Gaga, le processus de guérison a consisté à porter autant de masques que possible, à mixer des éléments existants de son art dans des projets plus importants, défiant ainsi un peu plus ses fans. En 2014, Gaga la jazzeuse a sorti l’album ‘Cheek To Cheek’ avec le crooner Tony Bennett. En 2015, Gaga l’enfant de Broadway a performé un medley de ‘La Mélodie du Bonheur’ aux Oscars. Cet automne, Gaga l’actrice a eu un rôle récurent à la télévision dans American Horror Story, pour lequel elle a gagné un Golden Globe. Sa dernière apparition médiatisée en public était aux Grammy Awards en février, où elle a rendu un hommage sincère mais clivant à David Bowie. Le fils de Bowie, le réalisateur de films Duncan Jones, a dit que c’était « mentalement confus » sur Twitter.
 
« Je ne voulais vraiment pas le faire lorsqu’ils m’ont appelée au début car c’était trop tôt après [la mort de Bowie] et je ne me sentais pas à l’aise, mais j’ai fait de mon mieux pour créer quelque chose qui – je l’espérais – serait le clou du spectacle de cette soirée, » dit-elle maintenant. Les commentaires de Jones l’ont-ils blessée ? « Oui. Bien sûr. Ça m’a blessée, » dit-elle doucement. « Mais qu’est-ce que vous voulez faire ? Je ne peux pas… c’est son père vous voyez ? »
 
Une question juste, parmi tous les changements, était celle-ci : où était partie la pop star amusante, scandaleuse, à l’épreuve des balles ? Et aujourd’hui, Gaga donne le crédit à sa tante disparue Joanne Germanotta pour l’avoir sortie de cette « spirale » et avoir ramené cette personne.
 
Joanne était la tante de Gaga, elle est morte d’une maladie auto-immune, le lupus, huit ans avant que Gaga ne naisse. La chanteuse porte l’un des noms – Stefani Joanne Angelina – de la sœur de son père, et sent qu’elle vit en elle.
 
« J’ai eu la foi toute ma vie qu’il y a quelqu’un qui me protège, un guide spirituel, un guide de l’âme, » dit-elle. « Un ange qui me survole quelque part, qui allait me montrer le chemin. »
 
Embrasser l’idée que sa tante veillait sur elle a conduit Gaga à creuser sa relation avec son père.
 
« Je pense que j’ai réalisé que pendant des années j’ai cru que j’avais la responsabilité de le soigner, mais en vérité ce n’est peut-être pas ma responsabilité du tout, » dit-elle. « Je n’ai jamais compris la rage et la colère de mon père, mais comprendre la perte de sa sœur m’a aidé à mieux comprendre d’où sa peine venait – et d’où ma peine venait, car elle m’est venue de lui. Je suis celle que je suis à cause de ma famille et j’ai porté beaucoup de honte durant longtemps car j’étais une rebelle. Mais j’ai réalisé que ma dureté venait de quelque chose avant moi, et de tout ce que ma famille et leurs familles ont traversé. »
 
Je suggère que cela pourrait surprendre les gens d’entendre qu’elle se sent honteuse sur tous ces sujets. Gaga lutte fièrement contre le harcèlement et l’intolérance – sa fondation caritative Born This Way travaille pour ces causes – mais elle se bat aussi pour une confiance en soi autoritaire. On ne met pas comme ça une robe en viande sortie de son placard pour une soirée.
 
« Je dis [honte] car je suis catholique, » dit-elle. « Même dans la Bible, il est dit que si vous chantez, vous êtes une femme de petite vertu. Ce genre de choses s’enracinent en vous dès le plus jeune âge. En grandissant et en étant celle que j’étais – très différente, très unique – que ce soit les gens à l’école qui se moquaient, ou mon père qui me disait que j’étais irrévérencieuse ou une ‘mauvaise fille’, ces choses sont restées en moi et elles se faufilent de nouveau en vous lorsque la boucle de la négativité revient dans votre vie. »
 
L’adolescente Gaga était, dit-elle, une « vraie fille de Jersey » – crop tops, coiffure volumineuse, beaucoup de maquillage. « J’étais une jeune femme amusante qui se cherchait, mais grandir dans un foyer italo-américain en faisant ce genre de choses, ce n’est pas très bien pris. »
 
C’est un sentiment qui a perduré lorsqu’elle a commencé à performer, mais cela a commencé à la puberté. « En grandissant, il y avait quelque part une honte de la féminité, dès que vous aviez de la poitrine ou dès que vous aviez l’air d’une femme – cela peut créer des conflits dans la maison, » explique-t-elle.
 
L’impression de regarder le passé de Gaga est omniprésent dans ‘Joanne’. Le morceau ‘Diamond Heart’ raconte l’histoire d’une fille qui travaille comme go-go dancer pour joindre les deux bouts, en termes de paroles c’est le genre de rêve américain brisé que chante Bruce Springsteen. Cette fille, confirme Gaga, c’est elle-même. « C’est complétement autobiographique, » dit-elle. “Lorsque j’ai déménagé dans le centre-ville [de New York] à 17 ans, je suis devenue go-go dancer. Je me rappelle regarder les hommes en me disant : ‘Soyez francs. Je sais ce que vous pensez que je suis, mais la vérité c’est que je ne suis peut-être pas parfaite – ouai, papa ! – et je ne suis peut-être pas sans faille – Papa ! Le Monde ! – mais j’ai un cœur de diamant. J’ai un esprit fort et bon en moi.’ La vie est un combat de chien pour beaucoup de gens. Lorsque vous trouvez le pitbull qui est en vous, c’est Joanne. »
 
Pour un album chargé des complexités de la relation père-fille, la communauté de collaborateurs de Gaga pour ‘Joanne’ est intéressante. Elle a assemblé un genre de gang de bikers hipster-rock – comprenant le Lothaire (NdT : personnage de ‘Don Quichotte’) fredonnant Father John Misty, le totémique leader de Queens Of The Stone Age – Josh Homme, l’excentrique de la pop Beck, le compositeur de ‘Sorry’ Bloodpop, le leader de Tame Impala – Kevin Parker et la britannique à la super-voix Florence Welch – et les a emmenés dans le désert californien pour travailler avec le super-producteur Mark Ronson. On doit le dire, cela semble un environnement plutôt masculin.
 
« Il y avait beaucoup de mecs, mais ce qui est génial c’est que c’était un club de mecs et qu’ils m’ont laissée entrer. M’embrasser en tant que musicienne a été un tel moment guérisseur pour moi dans ma vie – de ne pas être traitée comme n’importe quelle pop star. »
 
C’est véritablement la clef : Gaga n’est pas n’importe quelle pop star, et ‘Joanne’ n’est pas qu’un album. Au moment où j’écris, quatre jours avant sa sortie, l’album est encore complètement gardé secret pour tous, sauf nous privilégiés qui avons pu l’écouter sur un iPod dans les bureaux de son label Polydor. Mais ‘Perfect Illusion’ – qui est déjà sorti – n’a pas été le gros succès qu’on pourrait espérer pour un retour, culminant à la 12ème place des charts anglais et à la 15ème place des charts américains. En dehors des fidèles Little Monsters, certains se demandent si Gaga a toujours ce qu’il faut. Gaga ne s’en émeut pas.
 
« Les opinions sont comme les trous du cul ; tout le monde en a un, » dit-elle. « Je n’ai définitivement pas fait cet album avec l’opinion du monde pesant sur moi constamment à travers les toilettes de l’internet. J’ai utilisé les opinions de Mark Ronson et mes collaborateurs – et mes propres opinions. Je dois faire confiance à ma propre opinion. Ce n’est pas pour paraitre arrogante, je ne pense vraiment pas être une personne arrogante, mais après avoir vendu 80 millions d’albums, il faut te dire ‘Ok, pourquoi est-ce que je m’inquièterais de savoir ce que tout le monde pense de moi’ ? »
 
Elle marque un point. Mais on suspecte qu’une autre opinion compte pour elle : celle de son père, qui a tellement inspiré le projet. Alors, est-ce qu’il aime ?
 
« Je n’oublierai jamais ça, » dit-elle. « Nous étions en train de mixer l’album à New York et mon père disait ‘Tu sais, mon Dieu, MON DIEU, tu as fait beaucoup d’albums superbes mais celui-ci, celui-ci est VRAIMENT un album génial !’ Donc mon père l’adore. Mais c’est mon père, alors… »
 
C’est donc la nouvelle Gaga ; plus encline à être vue au restaurant qu’elle dirige avec sa famille, la Trattoria Joanne à New York, que dans un club ; plus encline à porter des shorts en jeans qu’une robe faite de Kermits. Est-ce la vraie Gaga ou une ‘Illusion Parfaite’ ? Heureusement, nous ne le saurons peut-être jamais vraiment.

[Lire la version originale]

Traduction : Christelle @Gagavision.net ©

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